Par un arrêt du 26 décembre 2012, le Conseil d’Etat a validé – pour la seconde fois en 5 mois – le décret n° 2011-984 du 23 juillet 2011 soumettant les grands parcs éoliens au régime juridique des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) (CE, 26 décembre 2012, Association France Energie Eolienne, req. n° 357.152)
La Haute Assemblée n’avait en réalité pas tellement d’autre choix puisqu’une précédente décision du 13 juillet 2012 avait déjà confirmé la force juridique du décret.
L’enjeu ne se situe désormais plus sur le terrain de la contestation du principe du classement des grandes éoliennes sous le régime des ICPE mais plutôt sur celui de la nature des prescriptions applicables (autorisation, enregistrement ou déclaration).
i. L’arrêt du 26 décembre 2012 : un copier collé de l’arrêt du 13 juillet 2012 ?
Le classement des parcs éoliens dans le régime des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE) a provoqué de nombreuses interrogations quant à son opportunité, lors de la publication du décret n° 2011-984 du 23 juillet 2011.
Plusieurs recours ont été déposés, notamment par les sociétés Volkswind et Innovent. Les arguments soulevés par ces deux opérateurs ont tous été rejetés par le Conseil d’Etat dans un premier arrêt du 13 juillet 2012 déjà commenté sur ce blog ICI.
Par une autre requête, déposée un peu plus tard, l’Association France Energie Eolienne a également demandé au Conseil d’Etat d’annuler le même décret.
C’est cette seconde requête qui vient à présent d’être jugée.
A lire les deux arrêts du 13 juillet et du 26 décembre 2012, il semble que les requêtes ont développé des moyens proches. Les mêmes causes entraînant les mêmes effets, le Conseil d’Etat a, pour la seconde fois, validé le classement des éoliennes dans le régime juridique des ICPE.
– procédure de concertation : l’inconstitutionnalité de la procédure d’adoption du décret n’ayant été prononcée par le Conseil Constitutionnel qu’à compter du 1er janvier 2013, c’est à bon droit que le ministre de l’écologie a simplement mis en ligne le projet de décret sur le site du ministère. On sait que l’adoption de la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public impose une concertation plus élaborée. Mais elle ne vaut que pour les décisions de l’Etat à venir.
– éoliennes et risques : Une nouvelle fois, le Conseil d’Etat évoque le rapport INERIS de décembre 2011 pour relever que l’implantation et l’exploitation de parcs éoliens peuvent présenter des risques et inconvénients de nature à justifier le principe d’un classement sous le régime des ICPE (sécurité, santé publique, faune préservation de l’environnement et paysage).
– éoliennes et promotion des EnR par la directive 2009/28/CE : Là encore, le Conseil d’Etat réaffirme que le classement ICPE ne provoque en soi pas d’entraves au développement de l’énergie éolienne.
ii. L’analyse : La simplification de la règle de droit implique de passer de la logique de confrontation à celle de partenariat
Désormais, sauf hypothétique remise en cause par le droit européen, le principe du classement des grandes éoliennes sous le régime des ICPE ne semble plus contestable sur le plan juridique.
L’enjeu semble donc se situer à un autre niveau que celui du classement ou du non classement des grandes éoliennes dans le régime des ICPE.
Concrètement, c’est plutôt la question des prescriptions applicables au titre de la législation des installations classées qui doit être posée car elle comporte deux avantages notables et réels :
– elle fait basculer la relation entre les opérateurs éoliens et l’Administration du terrain de la confrontation à celui du partenariat ;
– elle offre de réelles opportunités de succès et de simplification de la règle de droit.
En effet, ça n’est pas tant la législation applicable (ICPE en plus de l’urbanisme) qui soulève des difficultés que la longueur des procédures et l’éventuelle fragilité juridique qu’elles impliquent.
Or, les très récentes déclarations de la Direction générale de la prévention des risques (DGPR) laissent apparaître que l’administration est parfaitement consciente des progrès à faire et qu’elle entend jouer le rôle d’Etat-partenaire et non d’Etat-censeur.
A ce titre, une évolution majeure – et raisonnable -, conforme à l’esprit du classement d’activités sous régime des ICPE, serait d’envisager – après un bilan d’étape – une simplification des procédures pour certains parcs éoliens. Ces derniers pourraient être simplement soumis à déclaration ou à enregistrement.
C’est ce qui vient d’être adopté avec succès par le décret n° 2012-1304 du 26 novembre 2012 modifiant la nomenclature des installations classées pour six secteurs d’activités désormais soumis à un simple enregistrement dans certains cas (stockage en vrac de céréales et produits alimentaires, préparation et conditionnement de vins, installations de concassage-criblage, stations de transit de produits minéraux ou de déchets inertes, dépollution, démontage ou découpage de véhicules terrestres hors d’usage – VHU).
Une même évolution pour les parcs éoliens, justifiée par l’expérience accumulée, permettrait de sécuriser les projets tout en maintenant un niveau de sécurité et de contrôle proportionné.