Un décret du 9 mars 2021 pris pour l’application de la loi dite AGEC encourage les achats publics vertueux en instaurant une obligation d’achat de certains biens issus de l’économie circulaire. Il fixe une liste de produits impliquant une part minimale issue des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage.
Ce décret permet de faire un pas supplémentaire dans le sens d’un verdissement de la commande publique, instrument exemplaire du développement durable.
Le projet de loi Climat et Résilience, dont l’examen a débuté le 8 mars 2021 en commission spéciale, prévoit de poursuivre ce mouvement en renforçant notamment les clauses environnementales dans les marchés publics.
Contexte
Pour accroître la part des achats issus de l’économie circulaire dans la commande publique et ainsi renforcer le principe selon lequel « la commande publique tient compte de la performance environnementale des produits » (Code de l’environnement, L.228-4), le décret n°2021-254 du 9 mars 2021 fixe la liste des produits concernés par cet objectif et, pour chacun d’eux, la part minimale des achats publics qui doit être issue des filières du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage. Sa publication emporte des effets immédiats.
Le décret est pris pour l’application de l’article 58 de la loi dite AGEC relative à l’économie circulaire du 10 février 2020, selon lequel les biens acquis annuellement par les services de l’Etat ainsi que par les collectivités territoriales et leurs groupements doivent être issus du réemploi ou de la réutilisation, ou intégrer des matières recyclées dans des proportions de 20% à 100% selon le type de produits. Toutefois, cet article prévoit une dérogation et dispose que le pouvoir adjudicateur n’est pas soumis à une telle obligation en cas de contrainte opérationnelle liée à la défense nationale, ou de contrainte technique significative liée à la nature de la commande publique.
Champ d’application
Ce décret instaure une nouvelle obligation pour les acheteurs publics de recourir à des produits issus de l’économie circulaire, dans des proportions minimales fixées par le texte. Elle concerne un spectre étendu mais limitatif de domaines énumérés dans une liste : produits textiles et informatiques, bâtiments préfabriqués, véhicules, mobiliers, jeux, bicyclettes, consommable, mobiliers urbains… seuls les produits désignés dans l’annexe du décret sont concernés.
A chaque fois, le décret distingue :
- d’une part, une part minimale globale qui concerne indistinctement les produits issue du réemploi, de la réutilisation ou intégrant des matières recyclées. Cette part globale est fixée à 20%, exception faite de la filière papier, imprimés et livres (40%).
- et d’autre part une part minimale spécifique relative au réemploi et à la réutilisation. Cette part spécifique est fixée entre 0 et 20% de la part globale.
Le taux retenu par le décret se situe donc dans le bas de la fourchette prévue en février 2020 par la loi AGEC. Le texte précise à cet égard que les proportions minimales fixées « sont exprimées en pourcentage du montant total hors taxes de la dépense consacrée à l’achat de chaque produit ou catégorie de produits au cours de l’année civile ».
Cette mesure ne concerne que les marchés de fournitures, c’est-à-dire les marchés ayant pour objet l’achat de produits (Code de la commande publique, L.1111-3). Toutefois, ce décret d’application, qui aurait dû entrer en vigueur le 1er janvier dernier, prévoit que « pour l’année 2021, les marchés publics de fournitures pour lesquels une consultation a été engagée ou un avis d’appel à la concurrence a été envoyé à la publication avant la date de publication du présent décret [soit le 10 mars 2021], sont exclus du décompte de la dépense calculée ».
Les services de l’État et les collectivités territoriales concernées devront déclarer la part de leur dépense annuelle consacrée à l’achat de ces produits auprès de l’Observatoire économique de la commande publique, selon des modalités qui seront fixées par arrêté.
Force obligatoire
Le texte n’énumère pas de mesures des sanctions dans le cas où ces seuils ne seraient pas respectés par les pouvoirs et entités adjudicatrices de l’Etat, et des collectivités et leurs groupements.
Cependant dès lors qu’il s’agit d’une « obligation », son respect par les personnes publiques est susceptible d’être contrôlé par le juge en cas de recours contentieux liés à la passation des contrats de la commande publique.
Les ministres chargés de l’environnement et de l’économie devront faire un bilan sur la mise en œuvre du décret avant la fin de l’année 2022. Transmis au Parlement et rendu public, il devra analyser l’opportunité de faire évoluer la liste des produits concernés par cette obligation et les proportions minimales de réemploi ou de recyclage.