Afin notamment de réduire le nombre de déchets du bâtiment dans les dépôts sauvages, le gouvernement a organisé la création d’une filière de responsabilité élargie du producteur (REP). Ainsi, la loi AGEC, adoptée en 2020, prévoit l’entrée en vigueur de cette nouvelle responsabilité pour les produits et les matériaux de construction du secteur du bâtiment (PMCB) au 1er janvier 2022.
Pour ce faire, le gouvernement a élaboré plusieurs mesures d’application de cette REP, dans un projet de décret dont la mise en consultation s’est terminée le 26 juillet 2021 (Projet de décret relatif à la responsabilité élargie du producteur pour les produits et les matériaux de construction du secteur du bâtiment).
La consultation publique du cahier des charges de la filière REP doit à présent commencer.
Contexte :
Rappelons tout d’abord que le mécanisme de la REP consiste à renforcer pour les producteurs, l’obligation de gestion des déchets issus de leurs produits (article L. 541-10 du code de l’environnement). Or, la nouvelle REP doit concerner un gisement très important puisque le nombre de déchets du bâtiment s’élève chaque année à plus de 40 mégatonnes par an.
La loi AGEC a donc prévu que les PMCB destinés aux ménages ou aux professionnels seront repris sans frais lorsqu’ils feront l’objet d’une collecte séparée (L. 541-10-1 du même code).
Le projet de décret précise notamment le champ d’application de la REP, les conditions de collecte séparée donnant lieu à la reprise sans frais, ou encore les modalités d’action des éco-organismes.
Analyse :
- Définitions préalables
Le projet de décret définit au préalable certaines notions comme celle de « Produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment » correspondant aux matériaux et produits, y compris de décoration, fabriqués en vue d’être incorporés, assemblés, utilisés ou installés dans des bâtiments ou sur les parcelles sur lesquelles ils sont construits, à l’exception de ceux qui sont utilisés uniquement pour la durée du chantier (article 1er du projet de décret).
Précisément, le gouvernement décline en différentes catégories les produits concernés, dont notamment les minéraux, le métal, le bois, la peinture, le plâtre, le plastique, ou encore les produits d’origine végétale ou animale.
Enfin, le gouvernement explicite qu’une personne qui, à titre professionnel, fabrique, importe ou met sur le marché des produits ou matériaux du secteur du bâtiment qui sont destinés à être utilisés pour réaliser des travaux de construction ou de rénovation sur le territoire national, sera considéré comme un producteur soumis à ce régime de responsabilité (article 1er du projet).
- Mise en œuvre de la reprise sans frais
Le gouvernement révèle ensuite les modalités de la reprise sans frais des déchets concernés.
Pour ce qui est de la collecte (article 1er du projet), le projet distingue les déchets du bâtiment triés à la source et collectés séparément, des déchets qui, par exception, ne sont pas soumis à la collecte séparée (tri simplifié pour certaines collectivités locales, certains distributeurs, certaines entreprises du bâtiment, et certaines personnes qui assurent la reprise de déchets du bâtiment sur le lieu d’un chantier).
Le projet de décret précise en outre que l’obligation de reprise s’applique aux distributeurs disposant d’une surface de vente de ces produits d’au moins 1500 m2 et d’un chiffre d’affaires annuel supérieur à 1 million d’euros (article 2 du projet).
Enfin, si le principe est celui de la reprise sans frais, le gouvernement laisse la liberté aux éco-organismes de proposer des règles de tri plus exigeantes aux repreneurs, en contrepartie d’une compensation financière (article 1er du projet).
Autrement, lorsqu’un PMCB a été employé à des fins de constructions autres que celles prévue par la reprise sans frais, l’éco-organisme propose aux producteurs de déduire de leur contribution la part correspondante (article 1er du projet).
- Maillage territorial
Afin de garantir une mise en œuvre coordonnée de la REP, le gouvernement pose les conditions relatives au maillage territorial des installations qui reprennent sans frais les déchets du bâtiment (article 1er du projet). Ainsi, le maillage doit a minima permettre d’assurer un niveau de service de collecte satisfaisant, de respecter une distance moyenne entre le lieu de production des déchets et les installations de reprise des déchets, et de garantir que les installations incluses reprennent les déchets définis précédemment.
Chaque éco-organisme doit, à ce titre, établir un projet de maillage territorial, en tenant compte notamment des plans régionaux de prévention et de gestion des déchets et des installations existantes. Elaboré en concertation avec les collectivités territoriales chargées du service public de la gestion des déchets, le projet de maillage doit ensuite être validé par l’autorité administrative (article 1er du projet).
- Modalités d’actions des éco-organismes
Les éco-organismes doivent passer des marchés relatifs à la prévention ou à la gestion des déchets du bâtiment prévoyant notamment leur reprise sans frais. Ce contrat type doit notamment comprendre les modalités de la couverture des coûts supportés pour la reprise des déchets et celles de la collecte séparée (article 1er du projet).
Afin d’offrir un service simplifié aux détenteurs de déchets, le projet de décret prévoit la mise en place d’un guichet unique et la possibilité de faire des propositions conjointes pour tous les éco-organismes de la filière REP (pour le maillage territorial notamment).
Pour le cas précis des déchets amiantés, le projet de décret donne la possibilité aux éco-organismes de plafonner leur prise en charge.
Chloé Le Juez – Carl Enckell – Enckell Avocats